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Mot du Directeur  Général

En adoptant la Directive n°05/2005/CM/UEMOA du 9 décembre 2005 portant Contrôle et régulation des marchés publics et des délégations de service public, l’UEMOA poursuit deux objectifs complémentaires majeurs. En premier, il s’agissait de pousser les Etats membres à « mettre en oeuvre des procédures et mécanismes garantissant la séparation et l’indépendance des fonctions de contrôle et de régulation des marchés publics et des délégations de service public ». En second lieu, il était question de réitérer l’engagement de ces Etats « à mettre en place des mécanismes institutionnels et opérationnels de régulation qui ne peuvent être dévolus aux entités administratives chargées des fonctions de contrôle des marchés publics et des délégations de service public (…). Ces mécanismes doivent garantir une régulation indépendante des marchés publics (…) et une représentation tripartite et paritaire de l’Administration, du secteur privé et de la société civile ».

L’idée de fond était d’amener les Etats membres à se rendre à l’évidence que, dans le domaine spécifique des marchés publics et des délégations de service public, la fonction de contrôle doit nécessairement être séparée de celle de régulation et que l’exercice de ces fonctions ainsi identifiées et séparées soit confié à deux institutions différentes.

Dans la mise en oeuvre de cet engagement communautaire, chacun des Etats membres a créé une autorité administrative indépendante dénommée tantôt « autorité » tantôt « agence » de régulation des marchés publics. Quelques Etats se sont, néanmoins, inscrits dans une dynamique d’unification des composantes classiques de la commande publique pour verser les contrats de partenariat public privé dans le champ de la régulation et ériger, par voie de conséquence, l’ARMP en Agence ou Autorité de régulation de la commande publique (ARCOP).

Cependant, il y a lieu de relever que l’Etat du Niger n’a pas attendu l’adoption de la directive susvisée pour instituer son cadre de régulation des marchés publics et des délégations de service public. En effet, dans son format actuel, l’ARMP a été créée par l’Ordonnance n°2002-007 du 18 septembre 2002 portant Code des marchés publics. Cette ordonnance a été abrogée par la loi n°2011-37 du 28 octobre 2011 portant principes généraux, contrôle et régulation des marchés publics et des délégations de service public afin d’internaliser toutes les exigences communautaires en la matière. Le décret n°2011-687/PRN/PM du 29 décembre 2011 a été signé pour fixer la composition, l’organisation et les modalités de fonctionnement de l’ARMP.

Que l’on soit au Niger ou ailleurs, l’institution de cet organe procède d’une logique simple : promouvoir une réglementation moins distante de la société et des acteurs de la commande publique. C’est la raison pour laquelle, la régulation, mission par excellence des autorités administratives indépendantes, est appréhendée comme une manifestation d’un nouveau type de normativité juridique. Sa naissance s’explique par le progrès de la science juridique qui se caractérise par le passage d’un droit abstrait et général à un droit concret, souple, élaboré et appliqué avec son destinataire. On se dirige vers un droit empirique et téléologique.

L’idée d’instaurer une régulation concertée est matérialisée par l’association, au sein d’un même organisme, de membres représentant l’Administration publique, de ceux de la société civile et des représentants du secteur privé. L’organe ainsi crée et composé est investi des pouvoirs qui lui assurent la prise en charge effective de la fonction de régulation : recommandations pour faire évoluer le droit, larges capacités d’investigation, de contrôle et de sanction en cas de violation de règles qu’il est appelé à protéger.

Au regard de son organisation, de ses attributions et de son fonctionnement, l’on peut dire que l’ARMP est conçue à l’image de l’Etat en s’appuyant, notamment, sur le célèbre principe de la séparation des pouvoirs :

  • L'ARMP est législateur : elle est un organe d’orientation et de décision et dispose des pouvoirs les plus étendus pour définir et orienter sa politique générale et évaluer sa gestion. Cette fonction est prise en charge par le Conseil national de régulation composé de douze (12) membres issus de l’Administration publique, de la société civile et du secteur privé. Cette composition traduit l’idée selon laquelle le droit des marchés publics est un droit d’équilibre tant dans sa conception que dans sa mise en oeuvre.
  • L'ARMP est exécutif : De ce point de vue, elle est chargée d’informer et d’assurer la formation des acteurs, le développement du cadre professionnel et l’évaluation des performances des acteurs. Elle est également chargée de la mise en oeuvre des décisions du Conseil national de régulation, de l’organisation, de l’animation des activités et de la gestion des ressources humaines, matérielles et financières de l’Agence. Cette fonction opérationnelle est assurée par le Secrétariat exécutif composée de quatre directions et des secrétariats régionaux.
  • L'ARMP est judiciaire : Sous cette casquette, elle assure le contrôle a posteriori, diligente les enquêtes de façon spontanée ou à la suite des plaintes et dénonciations, procède au règlement des litiges et s’emploie à appliquer les sanctions prévues par les textes en vigueur. Si dans les autres Etats de l’UEMOA, cette fonction de l’ARMP est prise en charge par un Comité de règlement des différends, c’est-à-dire, un organe au même titre que le Conseil de régulation et le secrétariat exécutif et dont les membres proviennent de ces deux organes, force est de constater qu’au Niger les deux comités en charge de la question des litiges (le comité de règlement des différends et le comité ad’hoc de conciliation) sont rattachés à l’organe d’orientation et de décision de l’ARMP.

 

Enfin, concernant la problématique de l’indépendance de l’ARMP, il faut dire qu’elle se conçoit, en réalité, sous trois formes : une indépendance vis-à-vis des intérêts privés, une indépendance vis-à-vis des autorités publiques et une indépendance sous forme d’autonomie institutionnelle. Ce dernier point qui attire particulièrement notre attention s’appuie, entre autres, sur l’accès à des ressources ne dépendant pas des allocations du budget de l’Etat. C’est ce qui justifie, au fond, l’institution de la redevance de régulation sur laquelle nous reviendrons.

                                                                                         Dr. ISSOUFOU Adamou

                                                                   Directeur Général de l’Autorité de       

                                                                                   Régulation de la Commande Publique